La démographie , David Foot

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La démographie , David Foot

Les AffairesL'Actualité, samedi 31 août 1996, p. 4
Le Point
Baby-boomers : le professeur David Foot prévoit de profonds changements dans l'immobilier"La démographie explique les deux tiers de tout", affirme-t-il
Auger, Martine
Les baby-boomers canadiens ont leur Nostradamus : David K. Foot. Professeur d'économie de l'Université de Toronto, M. Foot prédit l'avenir à partir de statistiques démographiques et d'études des modèles de comportements économiques.
"La démographie explique les deux tiers de tout", affirme l'Australien d'origine dans son livre Boom Bust & Echo 1, publié en mai dernier.
M. Foot a livré au journal LES AFFAIRES quelques-unes de ses prévisions. D'abord, explique-t-il, le Canada est très sensible aux humeurs des boomers, parce que ce groupe forme un tiers de la population.
Le phénomène du baby- boom est d'ailleurs une réalité propre au Canada, aux États-Unis, à l'Australie et à la Nouvelle-Zélande.
Leurs politiques d'immigration étant des plus dynamiques, nombre d'Européens en âge de concevoir y ont émigré.
Entre 1947 et 1966, le Canada détenait l'un des plus hauts taux de fécondité des pays industrialisés, cumulant jusqu'à 4,2 naissances par famille, contre 3,7 aux États-Unis. L'Europe ne connut qu'un "mini-boom", précise M. Foot.
À 20 ans, ces Canadiens voulaient être au coeur de l'action. De 1970 jusqu'au début de 1980, les villes ont vibré de l'effervescence de leur jeunesse.
Ayant atteint la trentaine et élevant des familles, les boomers, séduits par le jardin et le garage double, se sont déplacés en masse vers la banlieue. Ce mouvement ralentira, prévoit M. Foot.
Au cours des 20 prochaines années, avides de reconstituer leurs souvenirs d'enfance, ils s'établiront dans de petites communautés dotées de bons hôpitaux. Les résidences près des centres de villégiature, à la montagne ou sur un lac, seront très en demande.
Leurs enfants, nés entre 1980 et 1995, auront alors quitté le foyer pour s'installer dans les métropoles, leur insufflant un regain de vitalité important, bien qu'inférieur à celui provoqué par leurs parents 30 ans plus tôt.
Ce que M. Foot appelle les échos du baby-boom représente le prochain groupe d'importance quant au nombre. Cependant, en raison du flot d'immigration constant vers l'Ouest depuis le milieu du siècle, cette cohorte demeure peu présente dans l'est du pays, à l'exception d'Halifax. Par conséquent, "l'avenir de Montréal est difficile à prévoir", précise M. Foot.
"Dans l'immobilier, les prix ne remonteront pas de façon significative d'ici 2010", estime-t-il. En cette fin de siècle, on risque de perdre plus que de gagner à y investir. Conséquemment, plutôt que de changer de résidence, on rénovera.
Les complexes immobiliers commerciaux
La démographie explique aussi l'évolution du taux d'inoccupation des complexes immobiliers commerciaux. Certes, la récession a frappé fort, mais ces tours furent érigées alors que la masse en âge de travailler atteignait son sommet.
Et, bien que l'on blâme l'avènement de la technologie, il demeure que les générations suivantes sont aussi trop peu affluentes pour occuper tous ces locaux. "Ces tours se rempliront, mais bien lentement", dit-il.
De plus, soutient M. Foot, l'exode des travailleurs vers les bureaux à la maison n'aura pas l'envergure anticipée. Dans l'avenir, les employés seront appelés à bouger latéralement à l'intérieur des entreprises. Ils devront être multidisciplinaires.
Et, tout comme on diversifie ses investissements, on ne devra plus tirer son revenu d'un unique employeur.
La retraite
Les boomers atteignent la cinquantaine. Au cours des prochaines années, ils tâcheront de se bâtir une bonne caisse de retraite.
Possédant déjà une maison, ils diversifieront leur portefeuille en investissant à la bourse, provoquant ainsi un accroissement de popularité pour les fonds mutuels.
Cette tendance devrait s'étendre sur les 20 prochaines années. Dans ce contexte, les actions canadiennes seront fort en demande, puisque les lois obligent que les placements REER soient constitués d'au moins 80 % de contenu canadien.
Autre répercussion du vieillissement des boomers : au cours des prochaines décennies, leurs besoins en soins médicaux ne feront qu'augmenter.
Les soins à domicile, ainsi que les traitements et les médicaments pour la ménopause et contre le cancer de la prostate prendront de l'importance.
Ainsi, malgré les compressions actuelles, "aussi longtemps que les boomers seront jeunes, notre système de santé sera en forme".
M. Foot prêche pour une réforme le plus tôt possible. "Nous sommes confrontés à deux options : payer plus pour soutenir le système actuel ou transiter vers une structure à double palier (privé et public)."
Sur ce point, M. Foot ne prédit rien. Il soutient cependant que la démographie se révèle un outil très puissant pour préparer l'avenir à court terme (trois à 15 ans).
Elle n'explique que "les deux tiers de tout", mais ses prophéties s'avèrent plus justes que celles des boules de cristal. Le livre de David K. Foot sera disponible en français chez Boréal dès la mi-octobre.
1 Boom Bust & Echo publié chez Macfarlane Walter & Ross par David K. Foot avec la collaboration de Daniel Stoffman.
Catégorie : ÉconomieSujets - Les Affaires : Démographie, population, etc.; Habitudes de consommationLieu(x) géographique(s) - Les Affaires : CanadaType(s) d'article : Chronique; EntrevueTaille : Moyen, 604 mots
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Doc. : news·19960831·ZL·031

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